La vie au coeur de la croûte océanique [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Âge de la croûte océanique en millions d'années avant le présent. Les
zones bleues foncées sont les endroits où la croûte océanique est
vieille de 100 millions d'années. En rouge, les plus jeunes. La croûte
océanique au niveau de la plaque de Juan de Fuca est jeune, elle a 3,5
millions d'années.Dans le basalte enfoui sous la croûte océanique, des micro-organismes vivent et se développent. Cette biosphère encore méconnue se dévoile peu à peu.Tandis que certains espèrent trouver des traces de
vie sur Mars, ou sous
4.000 m de glace, d’autres cherchent dans les profondeurs de la
croûte terrestre. Et ils trouvent ! Les scientifiques ont prouvé la présence
de microbes profondément enfouis. Ces micro-organismes survivent à des
conditions extrêmes : sous terre, il n’y a pas de
photosynthèse, et le milieu est anoxique. Pourtant, la vie existe dans les
sédiments marins et dans la
croûte océanique, jusqu'à
1,5 km de profondeur. Au sein des continents, le ver
Mephisto vit à 4 km sous la surface et un
collembole, proche des
insectes, s'épanouit à 2,5 km de profondeur.
Ces découvertes sont récentes et la biosphère de la
croûte océanique,
épaisse de quelques kilomètres et couvrant 60 % de la surface de la planète, reste largement méconnue. Cette croûte se forme au niveau des
dorsales, entre les plaques tectoniques. Au
rift, du
magma s’écoule, se cristallise très rapidement et forme du basalte. Celui-ci s’écarte peu à peu de la dorsale et est enseveli sous une
épaisseur de sédiments. Y a-t-il de la vie sous les
sédiments, au sein même de ce basalte ?
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]La plaque Juan de Fuca est l'une des plus étudiées au monde. Au niveau de la dorsale (en rouge), cette plaque est en contact avec la plaque Pacifique. Elle plonge au niveaux de la fosse des Cascades, c'est la zone de subduction (en bleu).
Une biosphère dans la lithosphère ?Les scientifiques, dont les résultats sont publiés dans la revue
Science, montrent que les
bactéries se développent en utilisant l’hydrogène de l’eau qui s’infiltre dans lacroûte. Grâce à ce composé, elles seraient capables de convertir le
dioxyde de carbone en matière organique. C’est le processus de
chimiosynthèse. Processus que l’on retrouve déjà dans les abysses océaniques, à proximité des
monts hydrothermaux par exemple. En l’absence de
lumière, mais en présence de composés minéraux, des bactéries sont capables de produire de la matière organique à partir de CO
2.
«Cette étude est très importante car elle confirme l'existence d'une biosphère dans les profondeurs du sous-sol terrestre, il est peuplé par des micro-organismes anaérobiques », explique
Kurt Konhauser, un géomicrobiologiste de l'Université de l'Alberta (Edmonton, Canada). Les scientifiques savaient déjà que la vie microbienne existe dans les sédiments, et dans le
basalte qui n’a pas encore été recouvert. Mais la présence de vie dans les parties plus profondes de la croûte océanique restait un mystère.
À bord du bateau scientifique de forage
JOIDES Resolution, l’équipe scientifique s’est rendue à la
faille de Juan de Fuca, qui fait face à
l’état de Washington. Ils ont réalisé un forage de 265 m de sédiments et 300 m de basalte. La croûte s’est formée voilà 3,5 millions d’années. Dans les échantillons de basalte, les microbiologistes ont trouvé des
gènes de microbes qui métabolisent les composés soufrés et qui produisent du méthane.
Des microbes retrouvés vivants Pour déterminer si
l’ADN provenait de micro-organismes morts ou vivants, l’équipe a chauffé les échantillons de roche à 65 °C dans de l’eau riche en substances chimiques présentes sur le
plancher océanique. Peu à peu, du méthane a été produit, ce qui montre que ces micro-organismes étaient bel et bien vivants et grandissaient. D’après l’équipe, il est certain que l’ADN est originaire de la croûte océanique, et non issu de la surface.
Compte tenu de l’étendue du plancher océanique, la question brûle aux lèvres : y a-t-il une importante biomasse dans la croûte terrestre ?
Si oui, jusqu’à quelle profondeur ? L’équipe prévoit d'analyser des
fragments de croûte recueillis dans d'autres sites de l'océan Pacifique
et de l'Atlantique nord pour y répondre.Source : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]