le.cricket Admin
Messages : 51313 Date d'inscription : 23/09/2010 Age : 72 Localisation : Mont de Marsan - 40000 - France
| Sujet: Un Noël sur les routes du grand Ouest américain ! Par Clément Dartigues Mar 18 Déc - 23:10 | |
| Un Noël sur les routes du grand Ouest américain !5000 miles de road-trip, de galères et rencontres, de l'Oregon l'Arizona, en passant par l'Idaho, le Wyoming et l'Utah.Dans notre volume 5, la photographe Laura Austin nous parlait des voyages en solitaire qu’elle se réserve à chaque nouvelle année, comme une forme de thérapie personnelle, une nouvelle chance d’appuyer sur son propre bouton « reset ». C’est un peu dans cet esprit qu’est parti Clément Dartigues pour sillonner le Grand Ouest américain. Une certaine idée de l’aventure et de la liberté, qui lui réserve bien des surprises.Plus d’aventures sur notre compte Instagram : @lesothersMe voilà enfin parti de Portland. Deux mois que je prépare ce road-trip… Les derniers jours de boulot devenaient de plus en plus longs. Je n’avais qu’une seule chose en tête : partir et profiter un maximum de mon temps libre avant que mon Visa n’expire… Ce voyage était devenu une sorte d’obsession. Plus le jour de départ approchait, plus mon impatience se transformait en peur. Je me préparais à parcourir 5000 miles, seul, pendant trois semaines, en plein coeur de l’hiver.La neige est déjà tombée plusieurs fois à Portland ces dernières semaines et je sais que les endroits que je vais traverser seront bien plus enneigés et froids qu’ici, donc certaines routes impraticables. Surtout dans le Wyoming, où la plupart sont fermées en hiver. Mais rien ne peut entamer mon enthousiasme.Steens Mountains, Oregon, décembre 2017Les premiers jours, je traverse tout l’Oregon d’Est en Ouest. Là, les imposantes Steen Mountains et Alvord Desert marquent la limite entre le Nevada et l’Oregon. Cet endroit est aussi magnifique que sauvage. Les populations sont rares, dans ce coin reculé. Je conduis depuis sept heures. La neige recouvre déjà les routes à certains endroits. Plus loin, un coyote se risque à traverser. Les highways se transforment en petites routes, les petites routes en chemins. Je me sens un peu perdu, un peu seul. Je suis à la fois angoissé et excité. Je ne compte pas accomplir quoi que ce soit d’exceptionnel durant ce voyage, mais ce sera une étape importante dans ma vie. Parfois, les problèmes personnels nous dépassent et l’envie de marquer une vraie rupture avec son quotidien prend le dessus. J’avais besoin de partir…Après de longues heures de conduite où je n’ai croisé qu’une voiture et quelques cadavres d’animaux, j’aperçois enfin une étendue blanche qui s’étire à perte de vue. Alvord Desert. L’excitation est à son comble. Tout cet espace m’appartient désormais. Pas de route, plus aucune règle… J’appuie sur l’accélérateur et file de l’autre côté du désert. Les quelques plaques de neige recouvrant le sol défilent de plus en plus vite. Je veux monter le camp avant que la nuit ne tombe. Le coucher de soleil est magnifique, mais rapidement la froideur du désert me fais oublier ce beau spectacle. Les premiers ennuis vont alors commencer. Le vent souffle fort. Allez savoir pourquoi, je décide d’utiliser mon jerrican d’essence pour démarrer le feu…Les bûches prennent instantanément feu. Mais en une fraction de seconde je vois les flammes s’étendre sur le sol en direction du bidon. Je n’avais pas vu ce petit filet d’essence ! Il prend feu juste à coté de ma tente et de la voiture ! Par reflex je donne un coup de pied dans le jerrican pour l’éloigner. Et c’est désormais ma jambe qui se retrouve aspergée de carburant et prend feu. Je parviens à l’étouffer avec mes mains et de la terre. Par chance mon jean et ma sous-couche m’ont protégé, seuls mes lassés de chaussures on brûlés. Je recule alors la tente et la voiture afin de protéger mes affaires.Résumons : je manque de me mettre le feu, au milieu de nulle part, après seulement trois jours de voyage. Je me sens si stupide. Le moral est au plus bas. Je ne sais même pas si j’aurais assez d’essence pour rejoindre la highway demain. Je préfère ne pas y penser. Je vois mon bidon partir en fumée pendant plus d’une heure. J’ai les extrémités gelées. Je fais bouillir de l’eau pour remplir ma bouillotte et me glisser dans mon duvet. J’ai décidé de dormir dans la voiture ce soir, le vent est trop fort. Je m’endors en regardant les étoiles par la fenêtre. Je pense à toutes les raisons qui m’ont amené jusqu’ici, et mes yeux se ferment.Après une heure de marche je croise un pick up conduit par un vieil homme. Il propose de m’aider à changer la roue. Il est étrangement silencieux. Il doit se demander ce que je peux bien faire ici. Par chance, il a du matériel dans sa voiture. Avec trois crics et des bûches de bois en guise de cales nous parvenons à changer la roue. Il faut encore injecter deux bombes anti-crevaisons pour regonfler le pneu. Je suis prêt à repartir. Je propose de le payer, il refuse, j’insiste… Il me serre la main et me dit “un jour c’est toi qui m’aideras”, avant de repartir. Me voilà à nouveau seul, je roule pendant 2 heures sur ces chemins perdus, à 20 miles à l’heure, afin d’éviter toute autre crevaison qui ruinerait définitivement mon voyage. Je parviens enfin à rejoindre la highway, mon soulagement est immense. La journée suivante, je traverse l’Idaho et répare la voiture. Il me reste peu de temps pour rejoindre Yellowstone. Je roule neuf heures d’un coup et parvient à rejoindre l’entrée Nord à temps. Tout est recouvert de neige, les paysages sont magnifiques. Mais le meilleur reste a venir. Je m’effondre dans un motel. Le lendemain matin tôt je pars avec un petit groupe et le guide vers Lamar Valley. L’endroit est aussi glaciale que magnifique, et malgré des températures avoisinant les -20°C, j’oublie vite le froid qui transperce tous mes vêtements. Les paysages sont figés dans la neiges, et seuls les immenses troupeaux de bisons viennent fendre l’épais manteau blanc. Nous observons des élans, des bisons, des coyotes dévorant une carcasse, des loutres dans Lamar River, à moitié recouverte par la glace. Et même une meute de loups, juste là, à quelques centaines de mètres… Je ne pensais pas avoir la chance d’en voir, j’en oublie toutes les galères de début de voyage. C’est un rêve de gosse.Je décide de descendre vers le Sud en fin de journée. J’aurais voulu revenir ici le lendemain pour continuer mes observations, mais le froid est trop intense, je n’ai pas l’équipement nécessaire pour endurer de telles températures. Je quitte alors le parc et roule environ 7 heures. Le trajet est intense, de nuit, sous une tempête de neige. Je suis exténué. J’atteins enfin Jackson, dans le Wyoming, une ville magnifique, au pied des immenses montagnes de Grand Teton National Park. Je m’endors dans la voiture. Au petit matin je me réveille tôt pour aller observer les montagnes et la vallée, mais l’endroit est recouvert par le brouillard et la neige, ce sera pour une prochaine fois. Au loin, j’entends le brame des wapitis, avant d’apercevoir un troupeau dans les plaines enneigées. Je quitte rapidement les lieux en direction de Salt Lake city, dans l’Utah. J’avais repéré des sources chaudes non loin de là. Même ici tout est recouvert de neige, et lorsque j’approche des sources, la route est fermée. Je décide de camper là et d’y aller à pied, le lendemain.Je descends jusqu’à Page où je me prépare à partir pour White Pocket, une zone reculée dans le désert, à 3 heures de route. Ça fait cinq jours que je ne me suis pas lavé. Je loue une Jeep puis me pose dans un campground ou je prends la meilleure douche de ma vie. Je tombe alors sur un couple de bretons voyageant depuis 5 mois. Décidément les Bretons sont partout. On passe la soirée ensemble. Je les embarque dans mon trip pour White Pocket le lendemain. On passera deux jours dans cet endroit hors du commun. Les journées sont chaudes et les nuits très froides. On se balade dans ces formations rocheuses venues d’une autre planète, sous un ciel clair et étoilé, refaisant le monde en buvant du bon whisky offert par mes amis américains avant mon départ.Je quitte tristement mes deux compagnons bretons pour continuer ma route vers Zion National Park et Bryce Canyon. Je sens la fin du voyage arriver. Je passe la nuit du premier de l’an dans des sources chaudes avec d’autres Américains, à boire des bières. Le froid est intense ce soir-là, sortir de l’eau chaude est un vrai calvaire. Je rejoins rapidement la chaleur de mon duvet. Le lendemain, je quitte les lieux et pour mes tout derniers jours de road-trip. Je traverse une partie de l’Utah et m’arrête dans des sources chaudes dans le Nevada. La pleine lune est déjà visible au-dessus des montagnes et le soleil couchant vient éclairer la vapeur d’eau. Je ne suis pas seul sur les lieux… un school bus aménagé est garé. Un couple d’une soixantaine d’année se relaxe dans l’eau. Je vais passer deux jours avec eux. Venus d’Alaska, ils voyagent la plupart de l’année, avec leur chien. On partage quelques repas, bien à l’abri du froid dans leur bus, en mangeant du saumon que Robert a lui-même pêché et conservé. Je m’attache rapidement à eux. J’ai comme l’étrange sensation d’être avec mes grands parents, en cette fin d’année. Il m’est encore plus difficile de les quitter, les reverrais-je un jour? Je dois repartir à Portland, la fin de mon voyage aux US se termine bientôt. Nous échangeons nos contacts et ils m’invitent à venir les voir en Alaska, dans leur chalet en bois flottant. Je connais déjà la destination de mon prochain voyage…Source : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] _________________ [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]le.cricket vous salue bien ! | |
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