VLT : première lumière pour Muse, un spectrographe intégral de champ !L'Eso dévoile la première lumière d'un nouveau spectrographe installé au foyer d'un des quatre télescopes du VLT. Muse (acronyme de Multi Unit Spectroscopic Explorer), c'est son nom, est ce qui se fait de mieux aujourd'hui au niveau mondial. Patrick Caillier, le responsable du projet, nous le présente brièvement.[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Cet ensemble de composants optomécaniques et électroniques est l’arrière de l’instrument Muse. On aperçoit les 24 spectrographes installés dans la structure mécanique. L'enchevêtrement de tuyaux reliés aux spectrographes permet le refroidissement des 24 détecteurs associés grâce à de l'azote liquide. Muse est ici vu au camp de base du VLT avant son installation au foyer de Yepun. Muse est un des quatre instruments de deuxième génération du
Very Large Telescope (VLT). Ce spectrographe intégral de champ (ou 3D) de nouvelle génération vient d’être installé au
foyer de Yepun, un des quatre
télescopes de 8,2 mètres qui forment cet observatoire situé
au Cerro Paranal, dans le
désert d'Atacama, au
Chili. Réalisé par
le consortium Muse et piloté par le
Centre de recherche astrophysique de Lyon, il est en phase de commissionnement et doit être réceptionné par l
’Eso en octobre 2014, date à laquelle il entrera en service.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Cette vue montre la façon dont l’instrument Muse offre une description 3D d'une galaxie lointaine. La lumière en provenance de chacune des portions de la galaxie a été séparée dans ses différentes couleurs — fournissant de précieuses indications sur les mouvements dont sont animées les différentes zones de la galaxie. Cette lumière donne aussi des informations relatives à la composition chimique et d'autres propriétés.Après une première série d’images techniques,
Muse vient d’acquérir ses premières
lumières scientifiques, dont des
galaxies lointaines, des
étoiles brillantes et bien d'autres objets célestes tels que
Jupiter et ses satellites. Comme nous l’explique
Patrick Caillier, le chef du projet,
« c’est un énorme succès et une très grande satisfaction de voir qu’on est dans les spécifications attendues ». En termes de performance pure,
Muse va
« au-delà de ce que l’on imaginait », souligne-t-il. De tous les spectrographes installés au VLT,
« il est le plus sensible » et peut dans un minimum de temps acquérir des données très impressionnantes et
« aller très très loin dans les profondeurs de l’univers ». Une troisième dimension pour les images astronomiques avec MuseMuse est un spectrographe à qui l’on a ajouté une troisième dimension aux images astronomiques. Cette troisième dimension correspond aux longueurs d’onde et fournit des informations de
couleur, du bleu jusque dans l
’infrarouge. Comme le montre l’image plus haut, on obtient à partir des données de
Muse une sorte de cube de données à l’intérieur duquel, pour chaque longueur d’onde, on obtient une image du ciel. Il est ensuite possible d’extraire un certain nombre d’informations dont l’âge, la distance et la masse de l'objet observé. Il est également possible de déterminer la
composition chimique ainsi que les propriétés physiques des différentes régions de l'objet étudié. Enfin, dans le cas de galaxies, Muse peut voir ce qui se passe à l’intérieur.
Afin de sonder des champs aussi grands que possible,
Muse n’utilise pas un, mais 24 spectrographes 3D ! L
'intégrité de l'information lumineuse est préservée grâce à l'utilisation d'une nouvelle technologie connue sous le nom de découpeur d’image. Muse utilise le plus grand découpeur d'image jamais utilisé en astronomie, et chaque spectrographe est équipé d'un
détecteur CCD de 16 millions de pixels.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]L'instrument Muse (sept tonnes tout de même), installé au foyer du télescope Yepun du VLT. Il utilise le plus grand découpeur d’image actuel.
Ce découpeur d'image est un système optique qui permet de diviser le champ en un grand nombre de petits
« spaxels » (ou
pixels spectraux, mot formé de
space et
pixel), de telle sorte que l’on peut obtenir un spectre de chacun de ces éléments spatiaux. Pour comprendre son fonctionnement, on s’imagine que ce champ de vue est un gâteau que Muse débite en 24 grosses tranches de champ de vue (épaisses de 1/24 de minute d’arc). Tout l’art est donc de découper le gâteau sans perdre trop de miettes. Il faut donc un couteau bien aiguisé : c'est ce découpeur d'image. Chacune de ces tranches est ensuite envoyée vers l’un des 24 spectrographes, qui la redécoupe, à nouveau grâce au découpeur d’image, en 48 tranches
« ultrafines ». Celles-ci sont ensuite dispersées pour en obtenir le spectre, et le résultat est enregistré par le capteur CCD.
Observer l’univers en aveuglePour donner une idée de la complexité de l’instrument, le découpeur d’image est en réalité composé de
deux jeux de 48 miroirs (un jeu qui découpe en 48 et un jeu qui réaligne les tranches, ou fentes). Il y a au total 24 découpeurs d’image, un par spectrographe, ce qui fait un total de
2.304 miroirs uniquement dédiés au découpage !
Grâce à cette capacité sans précédent d’observer l'univers en volume et en profondeur,
Muse devrait révolutionner l'étude de la formation et de
l'évolution des galaxies. C’est du moins le pari que fait
Roland Bacon du Centre de recherche astrophysique de Lyon. Ce responsable scientifique de
Muse compare son instrument à
« une fantastique machine à remonter le temps destinée à sonder l'univers primitif », un instrument à
« très fort potentiel de découverte », ajoute
Patrick Caillier.Pour comprendre cet entrain, il faut savoir que lorsqu’on utilise un spectrographe, il faut connaître à l’avance la position de l’objet. Avec Muse, cette contrainte s’efface,
« il n'a pas besoin de pointer une région ou un objet précis ». En effet, son grand intérêt est sa capacité à observer un champ d’une minute d’arc et de réaliser 90.000 spectres en une seule pose. Il acquiert
« autant de spectres que l’image compte de pixels ». En clair, il collecte des données sans savoir ce qu'il observe. Et c’est à l’intérieur des cubes de données que
« l’on s’attend à découvrir de très jeunes galaxies, quelles que soient leur localisation et leur distance ».
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