Les séismes déforment-ils définitivement la Terre ?[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Le désert d'Atacama est une région hyperaride située dans le nord du
Chili. C'est l'endroit qui abriterait les zones recevant le moins de
précipitations au monde. À Arica, il tombe en moyenne 0,8 mm de pluie
par an.Voilà près d’un siècle que la théorie du rebond élastique lors d’un séisme est communément admise. Elle traduit l’idée que les déformations de la croûte
engendrées par un tremblement de terre ne sont pas permanentes. Une
nouvelle étude suggère pourtant que les séismes majeurs déformeraient la
planète de façon irréversible. Cela remet complètement en cause l’élasticité des roches jusqu’alors reconnue.Lorsqu’un violent séisme se produit, il peut ravager la surface de la Terre, comme ce fut le cas par exemple au
Chili en 2010. Mais un tremblement de terre est aussi accompagné de rebonds cosismiques. Ces
mouvements ramènent les blocs de la croûte terrestre à leur position initiale. En conséquence, la déformation induite par un
séisme de la croûte n’est pas considérée comme permanente. Elle est le plus
souvent modélisée comme un phénomène élastique : c’est la théorie du
rebond élastique. En 1906,
Henry Reid proposait ce modèle pour expliquer
un cycle sismique.
Ce modèle est donc basé sur l’idée que les
mouvements de plaques à grande échelle engendrent localement des accumulations de contraintes. Lorsque les roches atteignent leur seuil de
résistance, un glissement brutal se produit le long du
plan de faille.
La rupture se propage, et lorsqu’elle s’arrête, c'est le séisme.
L’épisode est quasi instantané et relâche les contraintes. Le cycle peut
alors recommencer. Voilà maintenant plus d’un siècle que ce modèle est
utilisé ; pourtant, il se pourrait bien qu’il
faille quelque peu l’améliorer.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Dans la région étudiée au nord-ouest de l'Amérique du Sud,
la plaque de Nazca subduit sous la plaque sud-américaine. C'est donc une
région tectonique active qui engendre régulièrement des séismes.Au cours d’une étude menée sur
le site d’Iquique,
dans
le nord du Chili, l’équipe du géologue
Richard Allmendinger de
l’université Cornell montre que les séismes peuvent fissurer la Terre de
façon permanente. Leurs résultats, publiés dans
Nature Geoscience, suggèrent en effet que des séismes majeurs, c'est-à-dire d’une
magnitude supérieure ou égale à sept, ont visiblement forcé la Terre à se fissurer de manière permanente.
La Terre fissurée de façon permanenteSitué dans le nord du Chili, le désert d’Atacama est
l’endroit le plus sec de la Terre. Grâce à cela, les scientifiques ont
pu étudier les traces laissées par des milliers de cycles de
tremblements de terre.
Partout ailleurs sur la planète, les enregistrements fournissent
seulement des indices d’entre deux et quatre cycles de séismes. Les
processus de transformations en surface effacent souvent les
fissures engendrées par le séisme. La région d’Iquique est donc une véritable aubaine pour les géologues.
Ils ont ainsi recueilli des enregistrements de séismes remontant à un
million d’années !
L’enregistrement d’un grand nombre de séismes a
permis aux chercheurs d’étudier leur comportement moyen. Les fissures
observées ont été formées par un nombre de séismes compris entre 2.000
et 9.000 à la frontière des plaques de Nazca
et sud-américaine. Ces tremblements de terre se sont produits au cours
des 800.000 dernières années, voire voilà un million d’années. D’après
leur étude, entre 1 et 10 % des fissures provoquées par ces séismes sont
permanentes.
« Nous avons toutes les raisons de croire que nos
résultats seraient applicables à d'autres régions, mais les sites ne
sont jamais aussi bien conservés que dans le désert d’Atacama », explique
Richard Allmendinger.
Cette étude remet donc en cause les modèles basiques du
cycle de tremblements de terre.
Le modèle suppose normalement que toute déformation de la plaque
supérieure est élastique, et donc non permanente. Le comportement
élastique de la roche doit être révisé. En outre,
la zone d’Iquique est
l’un des seuls endroits de
l’Amérique du Sud occidentale à n’avoir pas
tremblé au cours du siècle dernier. Il a donc une forte probabilité
d’être soumis à un séisme majeur dans les deux prochaines décennies.
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