Alcoolisme : le Baclofène en passe d'être généralisé ?
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Le Baclofène devrait bientôt recevoir une recommandation d'utilisation
temporaire contre la dépendance à l'alcool de la part de l'ANSM. Ce
myocontractant rendait sceptique l'autorité de santé il y a deux ans
encore. Celle-ci entreprend actuellement des essais cliniques qui, à
terme, détermineront s'il mérite ou non une autorisation de mise sur le
marché.Les autorités sanitaires françaises viennent
d’autoriser une généralisation du Baclofène dans le traitement de
l’alcoolodépendance. Mais cette mesure est pour l’heure temporaire, car
seuls les résultats des essais cliniques
en cours pour tester l’efficacité du médicament permettront de
trancher. Michaël Szprync, chef de clinique en médecine addictologique à
l’hôpital Fernand Widal, explique à Futura-Sciences le pourquoi du
comment.Certains en parlent comme d’une révolution. Le
Baclofène,
un contractant musculaire connu depuis les années 1970, pourrait
bientôt enfiler une seconde peau et devenir l’un des principaux
traitements de l’alcoolodépendance. Bien qu’ayant à l’origine montré une certaine frilosité,
l’Agence
nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) pourrait à l’avenir autoriser la mise sur le marché du
Baclofène dans cette indication.
Pour l’heure,
Dominique Maraninchi, le directeur
général de l’agence du médicament, a annoncé depuis l’hôpital Cochin,
devant une assemblée de médecins et de patients,
une recommandation
temporaire d’utilisation (RTU) du Baclofène contre l’alcoolisme.
Une mesure qui pourrait être mise en œuvre à partir de l’été, et qui ne
pourra excéder trois ans. Elle permettra aux personnels soignants de
prescrire le médicament de manière plus générale, alors qu’aujourd’hui
les ordonnances étaient
tolérées au cas par cas.[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Le Baclofène aurait la particularité de rendre les patients dépendants indifférents à l'alcool. Mais on ignore encore comment.L’ANSM fait donc un pas vers une prochaine autorisation de mise sur le marché (
AMM).
Mais elle attend pour statuer de connaître les conclusions définitives
des essais cliniques actuellement menés, afin d’évaluer son efficacité,
les personnes potentiellement concernées, mais aussi les
effets secondaires constatés.
Des essais cliniques nécessaires avant une éventuelle AMMUne annonce très bien accueillie par certains
spécialistes et malades, qui voient là une avancée certaine. Mais une
partie de la communauté scientifique fait part de prudence et de
modération. C’est le cas par exemple de
Michaël Szprync, chef de
clinique en médecine addictologique à l
’hôpital Fernand Widal à
Paris.
« C’est une bonne chose que ce soit désormais
mieux encadré de manière réglementaire. Mais c’est également positif que
ce soit temporaire, car nous avons un cruel besoin de preuves
scientifiques de l’efficacité du Baclofène », précise le médecin à
Futura-Sciences.
En effet, bien que de précédents essais cliniques
aient déjà été menés, les autorités sanitaires nationales jugeaient ces
recherches insuffisantes, du fait de biais dans la sélection des
patients ou dans les observations. C’est pour cela que l’
ANSM a décidé
de mettre en place ses propres
études cliniques.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Le Baclofène est déjà disponible sur le marché pour soigner les contractures musculaires. Voilà quelques années déjà, et depuis la sortie du livre Le dernier verre d'Olivier
Ameisen (un cardiologue français racontant comment il a quitté l'alcool
grâce à ce médicament), les autorités sanitaires s’intéressent au
Baclofène et à son efficacité réelle !Baclofène : un peu, beaucoup, passionnément… jusqu’à quand ?Ces recherches répondent à une nécessité pour les médecins.
«
Même si des prescriptions au cas par cas ont pu être données en dehors
des essais cliniques, nous ignorons encore le profil type du patient qui
devrait recevoir le médicament »,
renchérit
Michaël Szprync. Car, comme pour beaucoup de traitements,
bien que des résultats préliminaires semblent souligner l’efficacité du
Baclofène, tout le monde ne peut en bénéficier.
« Certaines
personnes ne tolèrent pas le médicament et ne peuvent atteindre la dose
minimale de 150 mg qui est préconisée. Une partie des patients déclarent
des vertiges, des acouphènes, une sédation ou des nausées, les obligeant à arrêter la thérapie.
Il reste malgré tout à déterminer qui ils sont, mais aussi comment
moduler la dose en fonction du sexe, les premières expériences montrant à
priori que les femmes sont moins tolérantes. »Les essais cliniques en cours devraient donc
apporter de nouvelles informations, et permettre de prendre un peu de
recul quant à ces problèmes rencontrés. Mais une autre question se pose :
que faire du
Baclofène quand le patient a réussi à prendre ses
distances avec l
’alcool ?
« Personne ne peut répondre aujourd’hui, reprend le médecin.
Doit-on poursuivre les prescriptions qui peuvent paraître
impressionnantes, jusqu’à 300 mg par jour, ou doit-on diminuer les
doses, mais à quelle vitesse ? On l’ignore encore. Pourtant, cet aspect
est capital. »Un maître mot donc : patience. Laissons le temps aux essais cliniques de faire véritablement la
lumière sur l’efficacité du
Baclofène, qu’on ne peut toujours pas expliquer précisément. Si les effets
anxiolytiques semblent comparables à ceux obtenus à l’aide des
benzodiazépines, par
inhibition des
voies gabaergiques,
les mécanismes à l’origine de l’indifférence à
l’alcool restent mystérieux. Mais après tout, tant que ça fonctionne…Source : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]