Australie : un permis de tuer pour les crocodiles ?[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]L'Australie envisage d'autoriser la chasse aux crocodiles marins,
lors de safaris payants. Un projet déjà évoqué mais qui n'avait jamais
abouti face au veto des associations de protection des animaux. Le
gouvernement australien a lancé ce jeudi, une consultation publique. Sur quel pied danse
l'Australie ? En une seule journée, le ministre de l'Environnement Tony Burke s'est
mis à dos les défenseurs de la nature et leurs opposants. Il
réjouissait d'abord la communauté écologiste en proclamant la
création du plus vaste réseau au monde de réserves marines,
provoquant la colère des exploitants pétroliers et des pêcheurs. Et
puis, comme si le besoin de compenser s'en faisait sentir, il y a cette
déclaration qui encourage la
chasse aux
crocodiles marins, lors de safaris payants pour les touristes. Une
main tendue aux protecteurs de la nature bien vite rengainée.
Certaines
populations d'animaux sont en effet régulées par la chasse. Ce sont les
espèces dites "nuisibles" et leur régulation est bien souvent liée à la
protection d'exploitation agricole et forestière, mais se fait aussi
dans l'objectif de protéger la faune locale et contribuer par là-même à
l'expansion de la biodiversité.
La France agrée chaque année des
chasseurs professionnels qui ciblent des animaux spécifiques, en accord
avec les autorités locales, le ministère de l'Environnement et les
associations de protection des animaux. En
Australie, c'est aussi le cas. Les animaux domestiques retournés à
l'état sauvage peuplent de nombreux parcs nationaux et sont parfois la
cause de l'extinction d'espèces endémiques.
Le lapin, introduit par les
Européens au moment de la colonisation australienne, en est un exemple
parfait : sa facilité de reproduction a été telle qu'il a fallu
introduire des renards pour éviter qu'ils ne détruisent les cultures. Le
renard a ainsi profité de son rôle de prédateur pour s'attaquer à
d'autres espèces, endémiques celles-ci, et provoquer leur disparition
précoce. Régulièrement, les gardes-chasse, accompagnés de chasseurs
professionnels, ferment les parcs nationaux et traquent les chèvres, les
cochons ou les renards, menaces pour la biodiversité. Un crocodile aux dents longues Cette
fois-ci, le gouvernement australien a donc décidé de s'attaquer à un
problème plus récurent. Le
crocodile marin, ciblé par ce projet, est le
plus grand prédateur d'
Australie. Il vit dans les marais et les rivières
des régions côtières du nord du pays, et tolèrent aussi bien l'eau
salée que l'eau douce. C'est le plus gros reptile vivant, et les
accidents qui lui sont imputés, sont nombreux. Espèce protégée depuis
les années 1970, elle n'est aujourd'hui plus considérée comme menacée,
sa population compte près de 150.000 individus en Australie.
En
raison de l'accroissement du nombre de crocodiles marins, le
gouvernement estime qu'il se doit d'en réguler la population. Le
ministre de l'Environnement Tony Burke a ainsi proposé une consultation
publique sur le sujet :
"Il y a des opinions différentes au sein des
propriétaires traditionnels des terres concernées (les aborigènes:
ndlr) et je veux être certain d'entendre toutes les opinions", a-t-il déclaré cité par l'AFP.
Les
autorités du Territoire du Nord se félicitent de cette décision : elles
pourraient donner du travail aux aborigènes en tant que chasseurs ou
guides et favoriser l'arrivée de touristes venus chasser le crocodile
marin.
Un permis de tuer délivré aux touristes ? Si
le principe de régulation semble admis, c'est son ouverture au
"chasseurs-touristes" qui fait bondir la Société de protection des
animaux (RSPCA). Elle dénonce la chasse touristique au crocodile marin :
"il n'existe aucun bénéfice, en terme de protection de la nature ou
de contrôle des populations, à attendre de la chasse au trophée aux
crocodiles", s'est indigné Bidda Jones, responsable scientifique à la RSPCA.
"Il ne s'agit rien d'autre que de tuer des animaux pour le plaisir et rien ne peut justifier cela", a-t-elle ajouté.
De
son côté, le secrétaire à l'Environnement du Territoire du Nord, Karl
Hampton, s'est défendu en rappelant que des safaris étaient déjà
organisés pour contrôler la population de buffles et de cochons
sauvages.
"Comme pour ces safaris, ceux proposés par le Programme de
gestion des crocodiles seront soumis à la loi sur le bien-être des
animaux, et des conditions très strictes seront appliquées", a
souligné Karl Hampton.
Un quota de cinquante reptiles chassés pour les
deux premières années pourrait ainsi être mis en place par les
autorités.Cette nouvelle intervient quelques semaines après la
publication d'une photo du Roi d'Espagne Juan Carlos, posant avec son fusil de chasse devant un éléphant abattu,
au Botswana. La communauté internationale s'était indignée contre cette
image. Une fois encore, la question éthique d'un tourisme "chasseur"
demeure.
Source : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]